Les meubles

de Tristan Choisel


________



Ils ont leur naïveté à opposer au technocapitalisme

________


> Texte accompagné par Michèle Énée.
 
> Nomination au Prix d’écriture théâtrale de Guérande (Jardin d'Arlequin) - 2006.
 
> Sélection Panta Théâtre - 2007
 
> Lauréat de l’aide d'encouragement du Centre National du Théâtre (Artcena) - 2008.

________




> durée : 1 h
> 1 décor
> 7 personnages (2 femmes et 5 hommes) pouvant être interprétés par 5 comédiens (2 femmes et 3 hommes)

________




Un homme, une femme. La femme voudrait un enfant. Elle voudrait que l’homme n’en veuille pas. L’homme voudrait que le monde change. Puisque le monde ne change pas, l’homme déplace les meubles. Pour cela, il les a choisi légers. Ils habitent à deux pas de la mer. Mais ce qu’ils entendent n’est pas la mer, c’est tantôt une usine, qui couvre le bruit de la mer, tantôt le vent, qui couvre le bruit de l’usine. Leur intérieur n’est pas vraiment un intérieur. Il s’y invite un tas de personnages, parfois déplaisants, parfois menaçants, mais aucun ne fait le poids face à l’extrême naïveté de l’homme et de la femme, face à l’extrême fermeté de leur désir de fraternité. Le monde va changer. Parce que le monde a envie de changer.

_________

 

 

Extrait (début)

 



Une pièce vide, mis à part un évier. Une porte vers l’extérieur. Deux petites fenêtres.
Une femme. Elle s’habitue aux lieux.
Un homme entre, exalté.
LUI. Ça y est. Le monde est changé.
ELLE. Que dis-tu ?...
LUI. Le monde est changé ! C’est chose faite ! Nous vivons dans un monde nouveau!
ELLE. Tu es sûr de ça ?...
LUI. Les gens ne sont plus aujourd’hui ce qu’ils étaient hier !
ELLE. Je n'ose pas tout à fait y croire...
LUI. Tu dois.
ELLE. Hier, ils étaient ce qu’ils ont toujours été, et tu me dis que… ?
LUI. En quelques heures, ils sont passés à autre chose !
ELLE. Autre chose de mieux ?
LUI. De tellement mieux ! On ne les reconnaît plus !
ELLE. C’est déroutant !
LUI. Non, on s'y fait à la seconde – tel que tu me vois, je vis et respire dans ce nouveau monde avec mille fois plus de facilité que dans l'ancien !
La femme se laisse gagner par la ferveur de l’homme.
ELLE. Tu le savais ! Tu le pressentais !
LUI. C'est comme une autre planète !
Ils rient de joie.
ELLE. C'est toi qui avais raison !
LUI. Il ne fallait pas quitter cette planète mais rompre avec ce que nous étions : tu as rompu avec ce que tu étais, j’ai rompu avec ce que j’étais.
ELLE. De nouveau saisie par le doute.
Nous aussi ?...
LUI. Nous faisons partie du monde, nous faisons partie des gens.
ELLE. J’ai rompu avec ce que j’étais ?
LUI. Je te le dis.
ELLE. Je ne me sens guère changée…
LUI. Tu l’es ; tout le monde l’est, en un rien de temps ; c'est ce qui fait que le monde est nouveau ; de toute évidence.
ELLE. Mais comment est-ce que ça se manifeste ? Raconte !
LUI. C'est un changement à la fois saisissant et indéfinissable.
ELLE. Saisissant et indéfinissable ?...
Tu ne serais pas, dis-moi, en train d’embellir les choses ?
LUI. Je n'embellis pas, non.
ELLE. Tu as remarqué que les gens étaient un peu mieux disposés que d’habitude, tu arrives et parles d'un monde nouveau...
Sans agressivité.
Ça te ressemblerait bien…
LUI. Le changement est palpable.
ELLE. Tu embellis.
Tu embellis.
LUI. J’extrapole peut-être un peu.
Il y a du mieux.
ELLE. Il y a du mieux... Pas de pire ?...
LUI. Un peu de pire également.

[...]



Extrait


[…]

Un homme entre. Il se comporte comme s'il était chez lui, et comme s’il ne remarquait pas la présence de l’homme et de la femme, or, à moins qu’il ne soit aveugle, il ne peut que la remarquer. Cet homme est porteur d'ennuis : il le porte sur lui.
LE PORTEUR D’ENNUIS. Sans davantage les regarder qu’auparavant.
Que faites-vous ici ?
LUI. Si quelqu'un pouvait nous éclairer sur ce sujet... Vous, peut-être ?
LE PORTEUR D’ENNUIS. Je n’éclaire pas.
Votre place n'est pas ici.
ELLE. Mince !
LUI. À la femme.
Ne t'inquiète pas, notre place n'est nulle part. Il faut pourtant bien que nous prenions place à un endroit ou à un autre.
Également à l'attention du porteur d'ennuis.
Ici ou ailleurs.

[…]










Texte intégral et/ou résumé complet sur demande.