Hors d'atteinte, se dit-elle

de Tristan Choisel
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Mettre en danger les autres, consentir à de terribles sacrifices, pourvu que le bénéfice qu’elle peut en tirer lui soit présenté sous des dehors merveilleux, ne lui pose pas de problème.

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> Le texte cherche son équipe artistique.

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> durée : 1 h
> 1 à 3 femmes / 0 à 1 homme
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Les trente trois jours d’isolement de la jeune femme prennent fin dans quelques heures. Trente trois jours dans un logement qu’elle ne saurait situer et avec pour seule nourriture des salades de graines germées qu’une certaine Geneviève lui a déposées deux fois par jour à sa porte. Dans quelques heures, elle sera sauvée de ce monde en perdition. Il lui a fallu pour ça faire un sacrifice, sacrifice que ce monde en perdition qu’elle quitte jugera monstrueux et répréhensible.


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Extrait :

[...] 

 

À minuit, ils viennent la chercher.
Dans quelques heures.
Elle ne dormira pas ici cette nuit.
Trente-troisième journée.
Trente-troisième et dernière journée ici.
Son dernier repas ici.
Son dernier maigre repas.
Son sac est prêt.
 

Elle aurait pu sortir à tout moment de cette pièce, si elle l’avait voulu, durant ces trente-trois jours et ces trente-trois nuits,
la porte n’étant pas fermée à clef.
Elle aurait pu faire quelques pas dans le couloir.
Elle aurait pu même tenter de visiter le bâtiment,
pour savoir ce que c’est que ce bâtiment qui est tellement silencieux,
pour savoir si elle y était ou non seule,
pour tenter, depuis une autre fenêtre que la sienne, d’observer les environs,
eux aussi tellement silencieux,
d’observer les habitations alentours, habitations dont les jardins mitoyens laissent deviner l’existence.
Elle aurait pu même tenter de sortir du bâtiment.
Si elle n’y était pas parvenue en passant par le couloir, la fenêtre aurait fait l’affaire.
On est au rez-de-chaussée, il n’y a pas de barreaux.
Elle aurait pu si elle l’avait voulu explorer ce jardin à l’abandon pour en connaître la totalité,
choisir de préférence pour ça une des quelques journées où il n’a pas plu,
et même, de ce jardin à l’abandon, chercher éventuellement à sortir.
Elle l’aurait pu.
Mais il n’y avait aucun risque qu’elle le fasse,
aucun risque qu’on la surprenne occupée à enfreindre la consigne,
aucun risque qu’on doive la refouler,
qu’elle s’expose à pareille catastrophe.
On lui fait une immense faveur, à sa fille et à elle,
faveur qu’elle n’avait pas l’intention de gâcher.
Elle a respecté scrupuleusement la consigne.

  

[...]